vendredi 28 mai 2010

literatura

TODOS OS CACHORROS SÃO AZUIS [2008]

Traduction littérale :
TOUS LES CHIENS SONT BLEUS


De : Rodrigo de Souza Leão [Brésil]

Mon édition : 7letras, Rio de Janeiro, 2008.

Roman de 78 pages.

De Rodrigo de Souza Leão. Je répète, au cas où. Tout avait pourtant mal commencé entre nous : j'ai débusqué ton roman dans un bac à livres rempli de poussière et d'œuvres proches de la décomposition littéraire, je l'ai payé 1 euro. Autant te dire que je n'en attendais pas grand chose justement parce qu'il m'attirait. En commençant ma lecture j'ai remarqué qu'on avait un peu la même écriture, difficile alors d'apprécier. Puis que ça me faisait penser à Mémoire d'éléphant de António Lobo Antunes, indétrônable à mes yeux. Finalement j'ai compris que je faisais erreur : ton roman était certes autobiographique mais ton séjour en hôpital psychiatrique sentait plus que le vécu. Plus que l'étalage prétentieux de ta folie présumée. Plus que l'expérience traumatisante transcendée en œuvre d'art. Impensable : un pamphlet, un polar, une comédie, une allégorie, de la science-fiction, du nonsense cohabitant harmonieusement en moins de 80 pages ! Le tout écrit à la première personne par un schizophrène souffrant de troubles délirants persistants. En même temps : qui d'autre aurait pu écrire ce roman ? Je me suis dit : ce gars est un génie, je veux lire ses prochains livres. Je découvre Rodrigo l'écrivain après Rodrigo le personnage. Que t'as étudié le journalisme, que t'as un faible pour la poésie comme j'avais déjà pu le remarquer, que tu participes à tout un tas de revues et de groupes littéraires sur internet. Je découvre ton blog à toi, Lowcura (Loucura signifiant Folie en portugais) tout de bleu vêtu et enfin j'apprends que tu es... mort ? Oui, c'est bien ça, en juillet dernier... à 43 ans... dans un hôpital psy de Rio. C'est bien ma veine. Moi qui venais tout juste de trouver un écrivain qui faisait enfin fi de la postmodernité de mes couilles, celui qui s'était retroussé les manches plutôt que de s'en griller une autre. Faudra désormais que je te contemple sept pieds plus bas, la tête baissée dans une totale admiration en attendant que tes romans soient traduits en français, que ta renommée internationale et posthume tombe du ciel. Un ciel bleu royal, tu sais, au-dessus d'un nid de coucou.
La première des libertés c'est sortir de la chambre d'isolement. La seconde c'est de se promener dans l'hôpital. La liberté, uniquement en dehors de l'hôpital. Mais la liberté même n'existe pas. Je n'arrête pas de me heurter à quelqu'un pour être libre. Si on était libres le monde serait une folie avec tout le monde. Moi j'aurais pu sortir me balader avec Rimbaud et Baudelaire. Voyager vers Angra dos Reis (Baie des Rois).