samedi 10 octobre 2009

literatura

LA FAUTE DE L'ABBÉ MOURET [1875]

De : Émile Zola [France]

Mon édition :
France Loisirs, 2002.

Roman de 498 pages.

Décidément, l'heure est aux règlements des dettes que longtemps j'ai accumulé. La preuve en est avec cette lecture surannée, un Zola, une résurrection de mes lectures collégiales au moment même où j'en ai terminé avec mes études universitaires. Une semaine en Lozère, chez mes parents, était l'occasion rêvée pour enfin lire La faute de l'abbé Mouret, roman qui m'avait été prêté il y a un moment de ça par une amie d'enfance - le genre d'amie qui vous offre une petite chaîne en argent avec un pendentif qui porte l'inscription Ton amie pour la vie et qui refuse aujourd'hui de m'ajouter sur Facebook bien qu'il n'y ait pas eu entre nous de faute commise, juste une amitié qui s'est érodée au fil du temps, toi même tu sais.
Je ferai fi de tout préjugé concernant Zola et ce roman-ci en particulier. Les Rougon-Macquart c'est une chose, ce cinquième volume en est une autre. Zola s'est saigné pour écrire ce triptyque, à n'en pas douter. C'est d'autant plus visible lorsqu'on s'intéresse aux idées de fond du roman plutôt qu'à sa prose toute naturaliste. Pour moi, un roman anticlérical est toujours une bonne idée de roman à défaut d'être un bon livre. Zola y parvient avec une idée somme toute banale : un prêtre va fauter avec une sauvageonne. Seulement ici les oiseaux ne se cachent pas pour mourir, entends-moi bien, le jeune prêtre est loin de ressembler aux hidalgos en soutane des romans Harlequin et la sauvageonne n'est pas là pour faire chuter le curé de son autel afin d'aller ensuite tout raconter aux copines, de comment elle a viré sa cuti à un homme d'église. C'est long 500 pages ! Patiemment Zola tend sa toile. Lentement les deux amants recréent la Genèse dans un Paradou mythique. Et puis c'est le drame, la fin tombe comme un couperet grandiose. Tout comme dans la musique que j'aime finalement, lente lourde et puissante, pour mieux se faire délivrance et puis qui t'abandonne brusquement, un peu conne et toute pantelante.
Reprenons les choses depuis le début. L'Eden Adam et Eve, le serpent, la pomme, l'arbre de la connaissance, tout ça. T'avais quand même pigé que c'était des métaphores ? Que les auteurs de l'Ancien Testament ne pouvaient pas vraiment faire dans le porno ? Au cas où, Zola va t'apprendre la vie. Par où commencer ? "C'était, au fond de cette ceinture désolée de collines, un peuple à part, une race née du sol, une humanité de trois cents têtes qui recommençait les temps." Et moi qui lisait ça, au fond de ma vallée lozérienne, une édition empruntée à une amie-fille de paysans, c'était trop beau. Mais bien sûr ! Les descendants d'Adam et Eve sont les fruits d'amours incestueuses. Selon la Bible nous sommes bel et bien le produit d'une dégénérescence. Et après ça, tu regardes le journal télévisé et tu comprends pas. Où est-ce que je t'embarque là ? Zola il a bien pigé que tout ça était ridicule, mais comme tout n'est pas aussi simple, son histoire l'est également. Mais revenons à l'essentiel, à ce rapport sexuel qui se fait attendre. "Au fond des bois, les rossignols jetaient des rires perlés de volupté, les cerfs bramaient, ivres d'une telle concupiscence, qu'ils expiraient de lassitude à côté des femelles presque éventrées". J'ai poursuivi ma lecture la main dans ma culotte. La faute de l'abbé Mouret est un livre qui n'en finit pas d'être lyrique : amours prohibées, mortifications religieuses, nature luxuriante lascive vivante à la Stalker. Reste plus qu'à sucer la substantifique moelle de l'os qu'on te porte bien profond dans la bouche. Tu caches bien ton jeu mon salopiaud ! Je comprends mieux pourquoi on lui préfère Germinal ou L'Assommoir dans les collèges.
Zola a forcé sur la résine et les aiguilles de pin. Juste avant d'y aller franco sur l'écorce de chêne moulue.
P(ons).S(ylvette) : N'attends pas qu'on se retrouve pour de bon au cimetière de Mende pour me donner de tes nouvelles par vers de terre interposés. Viens récupérer ton livre, on parlera.

1 commentaire:

Daniel Fattore a dit…

Héhé... justement, je garde un souvenir ému de ces pages lyriques, plutôt inattendues chez un Zola. Merci de m'avoir rappelé tout ça!